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Plaines d’été est une programmation culturelle à l’initiative de la Direction Régionale des Affaires Culturelles Hauts-de-France. En 2021 et alors que la crise sanitaire gardait fermés les lieux de spectacle, Plaines d’été a mobilisé 46 équipes artistiques sur les places de marchés, dans les EHPAD, à l’orée d’une forêt ou en bordure de plage. Tous et toutes ont réalisé des impromptus durant plusieurs mois là où on ne les attendait pas. CARMEN a suivi ces instants saisissants de rencontre.

De la nécessité de l’inutile

Cie Home Théâtre à l’Espace Lecture du Cardan, Amiens, juillet 2021

« On ne présage pas de ce qu’on va trouver sur place. Parce que quand on imagine à l’avance, on trouve toujours autre chose. On se dit, on verra bien. » Exprime Jean-Marie, arpenteur occasionnel pour la Cie Home Théâtre, de Lille. Ou plutôt Hellemmes. « C’est situé juste à côté, mais ce n’est pas Lille. C’est important. »

Avec ses co-arpenteurs, ils sont venus à Amiens pour une rencontre avec les habitants vendredi 30 juillet. Rendez-vous orchestré par l’équipe du Cardan, rue Balzac. « Chaque arpentage est spécifique, explique Julien, arpenteur. C’est une recherche. Nous voulons découvrir en quoi un espace est incroyable en soi. L’arpenteur est un outil au service de l’espace public. » Celui-ci donne à réfléchir sur comment percevoir son propre espace.

© Gaëlle MARTIN

« Regarder à nouveau un peu en haut, un peu en bas. C’est en marchant qu’on cherche et qu’on trouve. » Le tout de manière ludique et en utilisant le farfelu avec beaucoup de sérieux pour embarquer les habitants dans l’aventure. Ces derniers ont immédiatement mordu à l’hameçon avec joie et force de proposition.

© Gaëlle MARTIN

Notre société tend à définir que l’espace doit être utile. Alors que l’inutile est tout autant nécessaire et précieux. L’inutile est une respiration, une perfection, une rêverie, une possibilité. L’espace est également truffé de petites incohérences. Des oublis. Des incompréhensions que les arpenteurs adorent chiner comme de petits trésors et points de départs pour leurs divagations. Par la suite, ils sont cartographiés et consignés sur un site internet. Des photos et des prises de sons à écouter avec gourmandise.

« Nous sommes adeptes de l’écrivain Georges Pérec, poursuit Jean-Marie. Comme des oulipistes, nous aimons partir d’une contrainte pour faire des trouvailles. Ici, nous avons noté que toutes les rues s’appellent Balzac. »

Les habitants des tours ainsi que des rues limitrophes connaissent bien les lieux. « Ici il y a nos jardinières, d’ailleurs il faudrait arroser. C’est sec. Là il y a Bintou. Elle fait de merveilleux beignets. Je lui en achète souvent. Et là, c’est l’aire de jeux. »

© Gaëlle MARTIN

Il s’y trouve un banc que les arpenteurs se sont chargés de mesurer avant de demander aux habitant ce qu’ils en pensaient.

« Est-ce que ça pourrait servir de lit ?
– Non !
– Pourquoi ?
– Parce que ce n’est pas confortable.
– Alors on va noter que ce n’est pas confortable. »

© Gaëlle MARTIN

Ceci fut fait illico grâce à un petit attirail de signalétique avant de passer au réel sujet de l’arpentage de ce jour. Baptiser la rue. « Nous allons écouter toutes les propositions et voter. » Ainsi fut émis rue du banc non-confortable, rue des tours, rue des maisonnettes dans le dos, rue des zèbres, rue du détour des tours (sans retour). Cette dernière a remporté les suffrages. Après une inauguration en règles, l’équipée s’est dirigée vers l’ancien terrain de basket, aujourd’hui à l’abandon. Les arpenteurs ont lancé l’idée de redéfinir un terrain de jeu. Avant de s’éclipser discrètement, voyant que les habitants avaient pris le relais, remarquant à peine le départ des hommes en oranges fluo.

© Gaëlle MARTIN

« On a pointé un endroit. Les habitants se sont réapproprié les lieux. Notre démarche s’arrête ici, » explique Julien.

Les habitants ont adoré l’expérience. Pour Sandra, c’est réaliser que l’on est acteur là où on habite. Qu’on a bien évidement le droit des faire des choses et de dire ce que l’on pense de l’endroit où on vit. Pour Delphine, mère de cinq enfants, c’est marrant et c’est une belle alternative aux écrans.

© Gaëlle MARTIN

Pour Eugénie, cette expérience la fait réfléchir. « C’est intéressant. Ce qu’on ne voit pas d’habitude, là on le voit… » souffle-t-elle timidement avant de se faire couper la parole par Delphine. « Eugénie c’est notre pépite en or ! Elle fait des photo magnifiques ! » Toute rouge devient Eugénie. « J’aime surtout photographier les fleurs, » montrant d’un coup d’épaule son appareil en bandoulière. « Je les poste sur Facebook. J’aime bien que les gens ouvrent les yeux et voient ce qu’ils ne regardaient pas avant. Et je me dis qu’ils (les Arpenteurs) font pareil.

– Et du coup, vous vous dites que peut-être, ce que vous faites, a de la valeur ?
– Oui… »

INFOS

Textes et photographies : Gaëlle MARTIN

Date de diffusion : 4 août 2021

Compléments

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http://plainesdete.fr/

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