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Amiens Métropole (80)

Éch picard din lé jorno

Au centre social de Rivery, langue picarde et découverte de son territoire grâce aux médias ont été au coeur de nos discussions.

Après avoir rencontré des élèves de CE2 et de CM2 le matin, nous débarquons ce mardi 19 décembre après-midi à la Maison Pour Tous de Rivery. Dans ce lieu de vie multigénérationnel, ça fourmille. Grâce à l’entremise d’Anne, la responsable du secteur seniors, nous avons un peu de temps pour discuter avec les participantes de leur rapport à l’information et de la représentation du territoire dans les médias. Alors que les enfants hauts comme trois pommes de la pause méridienne sont en rang d’oignons pour repartir à l’école, nos dames débarquent le pas pressé pour leurs activités. Les unes se dépêchent d’aller à la « Gym Prévention Adulte », les autres causent un peu avant de se lancer dans la peinture sur porcelaine. 

Le picard, un patrimoine

Pour attiser la curiosité de nos aînées, on leur propose de créer ensemble un tableau de mots et d’expressions en picard, la langue du coin. « Ça me rappelle ma vieille tante », s’amuse Anny, 80 ans. « Je lui disais d’arrêter de le parler, qu’on comprenait rien », se remémore-t-elle. Elle nous explique que c’est en vieillissant qu’elle s’est rendue compte de l’importance de conserver trace du passé : « c’est un patrimoine ». Marie-Françoise, 66 ans, est du même avis. Bien qu’étant arrivée en Picardie il y a 42 ans, elle se dit toujours bretonne : « Le picard ou le breton et les expressions qui restent, c’est ce qui fait que les gens se sentent appartenir à une région. » Elle se remémore ses études. Le breton, dit-elle, « il fallait le taire ». Elle-même faisait de la danse bretonne, mais n’en parlait pas trop aux autres, ce n’était pas un motif de fierté. 

Alors que les mots de sa tante lui reviennent progressivement à l’esprit, Anny, fine connaisseuse des médias locaux nous offre un petit panorama de l’offre en dialecte. « On a de la chance qu’il y ait toujours eu des gens qui se sont battus pour conserver ces langues. Maintenant, il y a même une section à la fac. » Sur France Bleu, Françoise Desmaret propose La minute picarde. Il y a  aussi chaque année depuis 2011 une édition spécifique du Courrier Picard. Elle recommande aussi  « Ch’Lanchron » journal trimestriel entièrement rédigé en picard édité depuis avril 1980. Leur site “Éch picard din chl’intarnéte” regroupe des tonnes de ressources dans cette langue.  

« J’ai l’impression qu’on y revient de plus en plus », sourit Marie-Françoise. On cause du rôle à jouer des médias dans cette affaire et on lui suggère de découvrir Splann, le média d’investigation qui traduit ses articles en breton. Plus généralement, la picarde d’adoption trouve que la région est de plus en plus mise en valeur.

La Une de ch’Courrier en picard.

Les médias, référents sorties  

Découvrir encore et toujours son territoire, c’est important pour ces dames. Car elles profitent de leur temps libre : bénévoles dans plusieurs associations, membres de clubs d’activités, abonnées au cinéma ou au théâtre, elles ne chôment pas. Anny est Amiénoise depuis toujours. Elle est abonnée au Courrier Picard « par tradition familiale ». Une tradition qui dure depuis pas loin de 60 ans. Elle l’a vu évoluer, baisser en qualité certaines années, perdre des pages. Elle regrette surtout que les secteurs géographiques couverts soient de plus en plus larges, ce qui enlève fatalement des articles sur les initiatives ou les recommandations culturelles les plus locales.

Nos deux retraitées aiment particulièrement les reportages sur les traditions et les initiatives dans les régions. « On se rend compte que notre pays regorge de choses incroyables et d’endroits à découvrir. » explique Marie-Françoise. Elle désespère de la grève à France 3 Picardie, qui la prive de son guide de sorties. Depuis le 8 novembre, les salariés grévistes s’opposent au projet Tempo, une fusion des journaux locaux et nationaux. Marie-Françoise a récemment découvert Wéo, une chaîne de télévision régionale. « Il y a des joyaux partout en Picardie, et pendant longtemps ils n’étaient pas connus, tant mieux que ça change. »

Sophie Bourlet, Clémence Leleu et Timothée Vinchon.

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